Bivouac à un lac sans nom dans le massif du Beaufortain.
Le choix de la sortie
La mi-juillet est-elle synonyme de l’arrivée tant attendue de l’été en France ? Tandis que l’Europe de l’Est transpire sous les vagues de chaleur, l’Hexagone est englué depuis de nombreuses semaines dans l’instabilité. Le beau temps durable semble enfin pointer le bout de son nez. L’occasion se présente d’aller arpenter les Alpes, à la faveur d’un week-end clément. Un vent modéré étant annoncé en altitude, je me résous à ne pas tutoyer les cimes, optant pour des secteurs plus protégés. Les conditions nocturnes se profilant favorablement, j’opte pour un objectif assez précis : immortaliser la Voie Lactée et son reflet dans un lac. Il suffit alors de prospecter la carte IGN pour trouver l’endroit convoité. C’est finalement un lac sans nom, à l’écart des itinéraires classiques, qui est retenu.
L’ascension au lac
Comme bien souvent ces derniers temps, c’est le tout proche massif du Beaufortain qui est choisi, sur son flanc côté Tarentaise. Sur les hauteurs d’Aime, à la Chapelle de Saint-Guérin (1593 m), la voiture est garée au parking. Ce dernier est déjà bien rempli, il constitue le lieu de départ de plusieurs randonnées. C’est vers l’une des plus occidentales d’entre elles que l’ascension démarre, peu avant 16 heures. La sensation de beau temps est à peine trahie par des nuages élevés çà et là, offrant un peu d’ombrage bienvenu. Le sentier arpente directement dans la pente du Bois Borgne, récupérant la piste d’alpage jusqu’au Chalet du Mont Rosset, exploitation d’altitude. Tarines et Abondances se délectent des riches prairies d’altitude, tandis que les ouvriers agricoles s’affairent à la traite, à la conduite du troupeau et autres activités.
Passé cet endroit, le secteur devient plus sauvage, place à la montagne brute, faite de grandeur et de minéralité. La sente surplombe le torrent de la Portette, donnant son nom localement à un lac, une pointe et un col. Sur un plateau chahuté, menant justement au col de la Portette, je bifurque plein sud en hors sentier sur quelques centaines de mètres. Dans un creux, se niche un plan d’eau circulaire, bénéficiant d’une ouverture de choix sur les sommets de la Vanoise. Le site s’annonce propice à mes ambitions du jour. Je profite de la fin d’après-midi pour dresser la tente sur un parterre herbeux, à l’abri du vent, un confort cinq étoiles.
Nuit féérique sous la Voie Lactée
Le soleil décline progressivement, et avec lui les couleurs se parent de teintes orangées. Les conditions anticycloniques laissent place à un spectacle relativement terne, ce qui ne m’empêche pas d’immortaliser les beaux reflets dans le lac, sous un ciel dépourvu de nuages. C’est quelques heures plus tard que les hostilités démarrent réellement. Le réveil claironne à minuit trente, après le coucher du croissant de lune. L’atmosphère est constellée d’innombrables étoiles, invitant à la rêverie. Seules les lumières des hameaux composant la station de La Plagne parsèment le versant opposé. Pendant plus de 2h30, j’erre sous cette immensité cosmique à capter la Voie Lactée, et m’adonne à quelques compositions nocturnes, grâce aux différents éléments naturels du lieu. Une nuit enivrante.
Les lueurs de l’aube
Après un bien trop court sommeil, me revoilà aux avant-postes pour accueillir l’aube. Comme la veille au soir, les conditions claires ne proposent pas de folies lumineuses, juste un éclairage progressif et en douceur. Dôme de Chasseforêt, Grand Bec, Grande Casse, Mont Pourri…Autant de sommets emblématiques de la Vanoise qui peu à peu honorent l’arrivée de l’astre solaire.
Épuisé par cette nuit éveillée, je retourne dans mon refuge de toile pour une sieste méritée, meilleur moment de la journée : quand le soleil réchauffe la tente et que l’air frais s’immisce dans les ouvertures, le tout dans un silence de cathédrale. Un bonheur simple.
Sous la chaleur dominicale, les 650 mètres de dénivelé sont dévalés, pour retrouver la voiture aux alentours de 11 heures, épilogue d’une agréable virée, marquée par la féérie nocturne et la beauté des reflets lacustres.