Rendez-vous dans le Beaufortain
Après plus d’un mois sans montagne, le besoin de retrouver la quiétude en haut devenait vital. Le week-end étant annoncé mitigé, c’est vendredi que la sortie démarre. Une nouvelle fois, direction le massif du Beaufortain, vers un secteur exploré il y a bien longtemps, en 2008 : les 5 lacs. Un peu inconsciemment, j’étais monté à la Pointe de la Combe Neuve, sommet abrupt, dans du schiste pourri, à mains nues, évidemment. Seize ans plus tard, les ambitions sont plus modérées.
Direction les 5 lacs
Le départ du sentier se situe au Fort de la Platte, accessible en voiture depuis Bourg-Saint-Maurice au terme d’une longue ascension sur une route étroite et sinueuse, dévoilant peu à peu le sublime de la Tarentaise. C’est aux alentours de 16 heures que les premières foulées sont exécutées, sous un soleil de plomb. Pas un nuage à l’horizon, les conditions anticycloniques depuis plusieurs jours ont enterré tout espoir de belles ambiances. Ce sera un décor de carte postale sous la tempête de ciel bleu.
Le sentier chemine dans les alpages, en remontant le long du ruisseau des Vieilles, jusqu’à atteindre le Col de Forclaz, dominant le vallon éponyme. Le paysage est somptueux, véritable image d’Epinal de la montagne savoyarde : torrents paisibles, prairies verdoyantes, cimes magnétiques et troupeaux sur les versants, dont le tintement résonne au loin. Un peu moins de 2 heures plus tard, le premier des 5 lacs est atteint, répondant au nom d’Esola, en contrebas. C’est là que passe l’itinéraire pour rejoindre le Passeur de Pralognan, en face. Encore quelques enjambées, et une nouvelle série de lacs émerveillent le visiteur : Riondet, Cornu et Verdet, l’un à côté de l’autre, reposant sur une vaste zone ouverte, face à la Pointe de la Terrasse.
Initialement, j’étais parti pour dormir sur la crête entre le Col de la Nova et la Pointe Motte, au-dessus du dernier des 5 lacs, le Noir. Mais devant les potentialités qu’offrent ces plans d’eau, j’hésite quelques minutes, puis valide ce spot. Un replat abrité au nord est trouvé, constituant un parfait endroit pour bivouaquer. D’autres tentes commencent à parsemer le secteur, heureusement suffisamment grand pour conserver le sentiment de tranquillité. En repérage, je tombe sur un bouquetin solitaire, que j’essaie de suivre à distance. L’animal est bien plus leste que moi. Débonnaire, il poursuit sa route à flanc de versant. J’arrive à lui voler sa silhouette en contrejour, mon lot de consolation.
Un paysage époustouflant
Le jour décline peu à peu, je me positionne au bout du lac afin de capter le reflet de l’imposante Pointe de la Terrasse. Les couleurs se parent d’orange puis, comme prévu, s’estompent lorsque l’astre vient flirter avec la ligne d’horizon, encombré par les voiles de chaleur. L’avantage des bivouacs de fin août est de bénéficier de nuits un peu plus longues qu’en juin, et donc reposantes. Avant de véritablement fermer l’œil, une fois la pénombre totalement installée, je ressors de la tente. Les étoiles scintillent, la Voie Lactée se dresse vers l’infini. Mais rapidement, le jour s’invite dans la nuit. Au nord-est, jaillissant des cimes, la Lune se lève. Bien que décroissante et lumineuse à 80%, les paysages deviennent nettement perceptibles, à peine est-il nécessaire d’utiliser la frontale pour se déplacer. Pendant un petit moment, je joue de compositions avec le satellite et le plan d’eau, avant d’aller dormir.
Quelques heures plus tard, à la clarté lunaire succède celle de l’aube. Bien orienté, le secteur profite des premiers rayons aux teintes dorées, mais éphémères. La chaleur investit ensuite rapidement les lieux, malgré l’horaire matinal et les 2500 mètres. Il est temps de redescendre. Une belle sortie pour refaire le plein d’altitude.