21-22 juin 2020
Si officiellement le solstice d’été a eu lieu le 20 juin à 23h45, voilà de nombreuses années que j’ai pris pour habitude de le célébrer à la date fixe et symbolique du 21 juin. Pas question de déroger à la règle pour 2020, direction la montagne afin de voir ce que va me réserver Dame Nature. J’ai longuement été indécis sur la destination. Au départ, j’étais attiré pour grimper sous Archeboc à la frontière italienne, vers Sainte-Foy-Tarentaise, mais à environ 2900 m d’altitude, l’enneigement encore bien présent allait fortement compliquer l’exercice. Après moult tergiversations, j’opte pour le Beaufortain, entre Pierra Menta et lac de Presset.
Le trajet en voiture m’emmène jusqu’au barrage de Roselend, puis ensuite une piste de quelques kilomètres, jusqu’au parking de Treicol (1710 m), bondé en ce dimanche ensoleillé. Je mange rapidement et entame l’ascension, il est 13h. Plutôt bien en jambes, les presque 800 mètres de dénivelé pour atteindre le Col du Bresson (2469 m) sont avalés en 2 heures. Entre temps, le ciel s’est couvert, il souffle et l’air est bien frais. Ayant eu l’information par d’autres randonneurs croisés en chemin comme quoi le Lac de Presset était encore pris sous la neige, j’exclus d’y aller. Je regarde autour de moi. A droite, en direction de la Pierra Menta, le bivouac risque d’être impossible en raison du caractère minéral et acéré du cheminement. En revanche, à gauche, la crête herbeuse me semble intéressante. Je décide alors de la grimper, il n’y a aucun sentier. Un peu plus haut, quelques bouquetins qui se pensaient tranquilles sont surpris, ils déguerpissent pour me laisser passer. Après une demi-heure d’errance sur cette crête, je ne m’aventure pas plus loin, au risque de faire de l’escalade dangereuse. Je reviens alors sur mes pas pour installer la tente sur un replat qui n’en est pas un. Je privilégie la qualité du spot plutôt que le confort.
Il est environ 17h, un plafond nuageux s’est installé sur le secteur. Il stationne vers 2700 m, le sommet de la Pierra Menta étant pris dans la brume. Je décide alors de faire une petite sieste, le froid ne m’invitant pas à rester dehors. Deux heures plus tard, je mange un bout puis commence à préparer le terrain pour le coucher de soleil, qui présente un certain potentiel : si le mur nuageux est toujours présent au-dessus, à l’ouest il subsiste une petite bande de ciel bleu. Je patiente un moment, puis des rais de lumière commencent à percer. D’abord timides, ils s’intensifient progressivement, mettant en valeur le barrage de Roselend à moitié visible d’ici. Vers 21h, je lâche le drone en même temps que la lumière crépusculaire explose. Les lieux sont envahis de tons dorés incroyables, aussi beau qu’éphémère, en quelques secondes, tout redevient fade. Quelques minutes plus tard, le soleil refait son apparition à l’horizon, complètement estompé par un voile nuageux, formant une boule rouge lumineuse. Le brouillard prend le relais, je me réfugie alors dans la tente pour entamer la plus courte nuit de l’année.
A 2h, le réveil sonne, il est temps d’aller faire quelques photos nocturnes dans la plus totale des obscurités. Un coup d’œil dehors, les étoiles sont visibles, les nuages se sont dissipés ! J’attaque d’abord côté sud pour capter la Pierra Menta sous la Voie Lactée, c’est magnifique. Je remonte la crête pour aller immortaliser la partie nord et tenter un circumpolaire… malheureusement la brume n’avait pas dit son dernier mot et de nouveau la voici qui investit les lieux. J’ai beau patienter un moment, rien n’y fait. Je retourne dormir, mais pas pour longtemps, puisqu’à 5h la sonnerie me rappelle à quel point le jour se lève tôt en cette fin juin. Le brouillard s’est dissipé, même s’il subsiste çà et là quelques bancs inoffensifs. Je m’occupe pendant plus d’une heure à capter les couleurs matinales, puis d’envoyer dans les airs une dernière fois le drone, notamment pour prendre la Pierra Menta sous des angles inédits.
A 8h, je plie la tente détrempée, et rebrousse chemin pour retrouver la voiture 900 m en contrebas. Bilan : une sortie riche en ambiances, avec la petite satisfaction personnelle d’avoir eu l’inspiration et l’audace d’un bivouac sur cette crête, pourtant peu appropriée pour un tel exercice.
Leave a reply