Les premières dizaines de mètres sous les Aurus sont quelque peu difficiles à négocier. Encore dans l’ombre, le sentier est complètement gelé. J’avance alors prudemment pour ne pas finir cent mètres plus bas. Une fois la crête ensoleillée atteinte, je peux enfin descendre sereinement vers le Collet du Peyron. J’y rencontre un groupe de randonneurs bien intrigués par le volume de mon sac.
Je poursuis la descente jusqu’à atteindre le Petit Lac Escur. Celui-ci a l’étonnante particularité de former un cœur. C’est ici que je me contente d’un frugal repas, puis continue la découverte des lieux, impressionnant par sa beauté. Le sentier longe ensuite le Lac Escur, reflétant l’imposante muraille rocheuse du Mouriare.
Souhaitant prendre un peu de hauteur, je me rends sur un mamelon herbeux en position centrale. Je m’allonge ici pendant un long moment, à profiter du soleil. Une double sensation m’anime : à la fois la chaleur bienvenue de notre étoile, et en même temps le froid apporté par le filet de brise, rappelant qu’à la mi-octobre à cette altitude mieux vaut être habillé.
L’horloge tourne. Après réflexion, je choisis mon lieu de bivouac, ce sera au bout du Lac de l’Ascension, près de son exutoire. Un replat enherbé s’avère tout à fait adéquat, j’y dresse mon abri pour cette nuit.
Le soleil décline et les couleurs prennent des teintes chaudes sur le relief. C’est le moment d’immortaliser le coucher de soleil. A la différence de la veille, pas un seul nuage à l’horizon ne vient troubler les festivités. Un peu de texture dans le ciel au-dessus de moi aurait apporté plus de consistance au décor, mais il faut se résigner à faire avec ce bleu homogène. Posté au bord du lac, je capte les derniers instants de lumière, d’une grande pureté. Curieusement, l’incandescence forme un liseré continu sur les hautes cimes qui me font face. Avec le reflet sur le plan d’eau, l’esthétique de la scène est assez originale. Au sud, le premier quartier de lune émerge par-delà la crête du Peyron.
La fraîcheur tombe rapidement, je ne traîne pas à rejoindre ma tente, manger et me reposer, bien que la journée ait été tranquille. Pas le moindre vent et un ciel totalement clair, le froid s’empare des lieux. Bien au chaud dans mon duvet, je décline l’idée d’aller sortir en pleine nuit, et même pour le lever de soleil. La veille, j’avais pu observer comment la lumière progressait sur le secteur et la configuration du site n’est pas favorable, en contre-jour. Qui plus est, toujours aucun nuage à l’horizon, autant d’éléments qui ne motivent pas à sortir l’appareil. Il est 9h40, je plie bagages. Pour finir le tour du propriétaire, j’opte pour une boucle en empruntant le sentier longeant une grande partie du Torrent de l’Ascension, au sud-ouest. Le parcours est désert, pas âme-qui-vive croisée sur cette longue portion jusqu’au retour à la voiture. Un séjour plutôt intéressant dans ce lieu de caractère…